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Les PFAS – ces polluants éternels qui nous collent à la peau

Nous vous proposons de faire le point sur un sujet d’actualité par mois concernant la santé environnementale.

En santé environnementale nous faisons le lien entre l’état de santé de l’Homme mais également celui de l’environnement. L’état de santé est déterminé par plusieurs facteurs notamment environnementaux souvent liés à l’activité humaine. L’origine des maladies n’est pas seulement dû à notre génétique, mais également à tous les facteurs qui nous entourent. Selon l’OMS, il existe quatre classes de polluants : Physique (exposition aux champs électromagnétiques, wifi, micro-ondes, fibres d’amiante, plomb etc.), Chimique (exposition aux substances chimiques synthétisées dans nos cosmétiques, alimentation etc.), Biologique (exposition aux pollens, poils, acariens, moisissures etc.) et Sociaux & Psychosociaux (conditions de travail, de logement, stress chronique etc.).

Les objectifs ultimes sont de prendre soin de notre planète, de notre santé et de la biodiversité. Nous parlons du concept « One Health », ou encore « une seule santé », entre l’animal, l’humain et la biodiversité.

PFAS – ces polluants éternels qui nous collent à la peau

Depuis quelques mois le sujet des PFAS se trouvent dans tous les journaux, ces substances appelées « polluants éternels » auxquelles toute la population est exposée par l’air, l’eau, les sols et l’alimentation. Les propriétés stabilisantes de ces substances les rendent persistantes, mobiles et bioaccumulables dans les organismes. Dans cet article, nous allons nous pencher sur l’historique de cette substance ainsi que ces propriétés, les conséquences au niveau financier, sur la santé et l’environnement ainsi que des alternatives pour diminuer l’exposition.

1. Décryptage d’un scandale oublié par les industriels

Les PFAS ou encore substances per- et polyfluoroalkylées sont des chaînes de molécules composées d’atomes de carbone et de fluor (composés organofluorés), extrêmement résistantes, d’où leur nom de « polluants éternels ».

Remontons dans le temps …  La découverte du Téflon ou Polytetrafluoroethylène (PTFE) s’est faite accidentellement dans les années 1938 par la firme DuPont de Nemours aux Etats-Unis mais à cette époque la molécule n’a pas été exploitée.

C’est à partir de 1940, lors du projet de la bombe atomique que cette molécule refait son apparence et est utilisée pour la première fois.

Entre 1954 et 1960, la firme DuPont de Nemours dépose la marque Teflon® et a commencé à commercialiser le PTFE, mondialement, dont les ustensiles de cuisine à partir de 1951. De nombreuses publicités, sortent sur les écrans pour venter l’efficacité de ces poêles.

Dans les années 60, une seconde utilisation voit le jour avec le développement de l’AFFF (Agent Formant un Film Flottant) autre famille des PFAS, c’est une mousse filmogène aqueuse utilisée pour l’extinction des incendies.

Par la suite, l’utilisation des PFAS n’a cessé pour leurs nombreuses propriétés : résistances aux hautes températures mais aussi aux huiles, eau et produits chimiques, tensioactives (antiadhésives, imperméabilisantes).

Ils sont désormais utilisés dans divers domaines industriels et produits de consommation courante : textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, revêtements antiadhésifs, cosmétiques, produits phytosanitaires, etc. On peut également les retrouver dans les emballages de fast-food ou les intrants agricoles.

C’est à partir de 2001, aux Etats-Unis que le premier scandale sanitaire éclate. La firme, DuPont de Nemours, est accusée d’avoir contaminée, avec le PFOA (acide perfluorooctanoïque) utilisé également pour la production du Teflon (tétra-fluoroéthylène) puissant anti-adhésif et supportant des températures extrêmes, plus de 70 000 personnes causant des affections thyroïdiennes sévères, cancers des testicules, du rein, du sein, hypercholestérolémie, malformation fœtale etc. Un film : Dark Waters, sorti en 2019 retrace ce long combat pour faire reconnaître la responsabilité de l’entreprise en total connaissance de cause. 

A partir des années 2000, le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer) a classé le PFOA comme cancérigène du groupe 2B (cancérigène groupe 2B).

2. Pourquoi ces polluants posent-ils problèmes ?

Ces substances ont attiré l’attention à cause de leur toxicité et leur caractère de polluant très persistant présents dans l’eau, l’air, le sol, les pluies, les écosystèmes, le sang humain ainsi que dans le placenta. Des PFAS ont même été retrouvés en antarctique, dans le sang des ours polaire. Grâce à la convention de Stocklom (accord international visant à interdire certains polluants) l’utilisation des PFOS (sulfonate de perfluorooctane) est restreinte à partir de 2019, classée parmi les POPs (polluants organiques persistants) en raison de leur nature omniprésente, persistante, bioaccumulable et toxique, interdit l’import, l’export et la production du PFOA en 2019 puis du PFHxS (acide perfluorohexane sulfonique) (tensioactif fluoré anionique – POP bioaccumulant) en 2023.

Problème ?

L’histoire se répète, comme le bisphénol A interdit mais remplacé par d’autres bisphénols pas encore bien étudiés, ces SPFO et l’APFO sont remplacés par des PFAS à chaîne courte, tels que l’acide perfluorohexanoïque (PFHxA), l’acide perfluorobutanesulfonique et le perfluorobutanesulfonate (PFBS).

Selon l’ONG Génération future, la pollution aux PFAS serait largement sous-estimée. Des analyses récentes réalisée par un journaliste d’investigation de l’émission « Vert de Rage » pendant 1 an, aux alentours des usines « Daikin » et « Arkema », au sud de Lyon reconnu comme le site le plus pollué de France, a réalisé des analyses montrant des concentrations inquiétantes. Les échantillons prélevés révèlent des teneurs 36 414 fois plus élevé (ng/l) de concentration de PFAS au niveau du canal usinier comparé aux prélèvements fait en amont dans l’eau du Rhône. Le PFOA y est notamment retrouvé. Pourtant, selon Arkema, cette substance n’est plus utilisée depuis 1980. Tous les échantillons d’eau du robinet provenant du champ captant du Rhône dépassent la norme de 100 ng/l.

Les prélèvements de terre ont également démontré la contamination élevée de 5 PFAS dont 1 toxique sur les légumes et œufs de poules par des PFAS aux alentours de ces lieux et ont suggéré de ne pas consommer ces aliments.

Concernant la qualité de l’air le constat est le même avec notamment 2 composants retrouvés en grande quantités (6:2 FTS et le PFHxA).

3. Coût du scandale

Le coût s’élèverait entre 52 à 84 milliards d’euros pour les systèmes de santé européens. Les coûts annuels de dépistage, surveillance, traitement de l’eau, dépollution des sols, en cumulé seraient évalués aux alentours de 821 millions d’euros et 170 milliards d’euros. (UE + Suisse)

Certains représentants bougent …

Certains pays européens et hors Europe avancent aussi sur la question : Allemagne, Danemark, Pays-Bas, Suède et Norvège ont soumis une proposition dite de restriction basée sur le règlement REACH pour obtenir une interdiction européenne de la production, de l’utilisation, de la vente et de l’importation de PFAS.

Le député Nicolas Thierry, a déposé une proposition de loi interdisant dès 2025 les produits contenant des PFAS lorsqu’une alternative existe, avant une interdiction totale en 2027.

 

Le 30 mai 2024, le Sénat a adopté ce texte visant à restreindre l’usage des « polluants éternels ». Ce qu’il faut retenir :

Interdiction de la production / vente et de l’importation en France à partir du 1er janvier 2026 des PFAS dans :

  • Les farts de ski
  • Les cosmétiques
  • Les textiles d’habillement (sauf vêtements et protection professionnelle) et les chaussures

Concernant l’eau potable, les PFAS devront être contrôlés obligatoirement ainsi que dans les eaux minérales

Le principe de « pollueur payeur » engagé par les industriels pour dépolluer les sites contaminés et un versement de redevance aux agences de l’eau. Par ailleurs, la place du grand lobbyste Seb a obtenu gain de cause car les ustensiles et poêles ne sont pas concernés par cette loi, ainsi que les vêtements de protection des pompiers et les mousses anti-incendies. Pour rappel, de plus en plus de pompiers, notamment jeunes, développent des cancers de la prostate. Selon Christophe Béchu, l’interdiction de ces polluants dans les vêtements professionnels est prévue au niveau européen à l’horizon 2027, ne voyant pas l’intérêt de prendre de l’avance.

Les coûts engendrés et les frais médicaux liés aux expositions aux PFAS soulignent l’urgence d’une réglementation stricte et d’une transition vers des alternatives plus sûres et durables. L’utilisation de ces substances dans divers produits industriels et de consommation ont engendré des scandales majeurs en raison de leurs effets néfastes sur la santé et l’environnement. Dans un prochain épisode sur la série des PFAS, nous parlerons de ces effets ainsi que des solutions et alternatives à mettre en place.

Lisa Bonal
VSC FNE OP