Le déclin du Grand tétras se poursuit sur l’ensemble des Pyrénées (population passée en quelques années d’environ 4000 adultes sur le versant Nord des Pyrénées à 3200 aujourd’hui, avec un déclin d’environ 2% par an), comme l’a confirmé l’Observatoire des Galliformes de montagne (O.G.M), lors de la dernière réunion de la Stratégie nationale en faveur du Grand tétras, le 9 novembre dernier.
Programme d’actions (2023-2024)
Ce programme porté par Nature Comminges, fait l’objet d’une subvention au titre de l’axe 3 du Fonds vert pour la transition écologique (Axe 3 I Améliorer le cadre de vie Accompagnement de la stratégie nationale biodiversité 2030); mesure 2.3.4 (Restauration écologique. (a)-rétablir les continuités écologiques). Il s’agit de crédits gérés par le Préfet de chaque département ; les demandes de financements s’effectuent « au fil de l’eau » suivant une procédure simplifiée (saisie en ligne sur la plateforme https://www.ecologie.gouv.fr/fonds-vert ) ; l’instruction du dossier est effectuée par l’Agence de l’Eau Adour-Garonne, après avis des différents services (DDT, DREAL, etc). C’est un outil de subvention qui permet de démultiplier les actions en faveur de la biodiversité.
Dans un contexte où l’évolution climatique très défavorable explique en partie la faible dynamique reproductive, il est important d’agir sur les causes humaines multifactorielles de ce déclin. Dans la continuité du moratoire sur les prélèvements cynégétiques porté par FNE Occitanie Pyrénées, il est nécessaire de lutter contre les causes de mortalité accidentelles en équipant les câbles et les clôtures identifiés comme potentiellement dangereux par des systèmes de visualisation adaptés. Il est également nécessaire d’augmenter les habitats destinés à la nidification et l’élevage des jeunes afin de réduire l’impact du surpâturage et de l’abroutissement dans les zones à fortes densités de cervidés. Enfin, dans le cadre du développement du tourisme 4 saisons et l’affluence que l’on observe en montagne depuis le déconfinement (trails, skyrunning, raquettes, VTT électrique, tyroliennes, etc), des actions de sensibilisation du public sont nécessaires pour canaliser les flux et éviter l’organisation de manifestations sportives durant des périodes sensibles ; les études d’impact préalables doivent prévaloir pour tout aménagement lourd impactant le Grand tétras.
Un programme en trois actions en faveur du Grand tétras
Action 1
La première action consiste dans la poursuite de la visualisation de linéaires de clôtures pastorales et forestières sur les zones potentiellement dangereuses où avérées sur la montagne haut-garonnaise ; ce travail avait été amorcé par Nature Comminges en 2005 sur deux clôtures forestière en lien avec l’Office National des Forêts ; il doit se poursuivre désormais avec les groupements pastoraux et la Chambre d’Agriculture, dans le cadre du programme « Agrifaune » ; dans la dernière enquête de l’Observatoire des Galliformes de montagne, menée tous les deux ans sur l’ensemble du massif (enquête sur les câbles et les remontées mécaniques dans les Pyrénées), 285 km de linéaire (dont 365 remontées mécaniques) et un fort linéaire de clôtures pastorales -dont 70% ne sont pas visualisées- ont été identifiées comme dangereux ; on y a recensé 176 cas de mortalité dont 80 Grand tétras (soit plus d’oiseaux sur l’ensemble du massif que ceux qui avaient été attribués pour la chasse avant l’adoption du moratoire). L’équipement par des visualisateurs métalliques et de couleur permet de limiter fortement ce danger ; des chantiers participatifs ouverts à toutes les bonnes volontés (regroupant des bénévoles et un salarié de FNE OP) vont se tenir entre la fin de l’année 2023 et l’année 2024, à des périodes favorables.
Action 2
La seconde, prévue à l’été 2024, consistera dans une action de reconstitution d’un milieu favorable au Grand tétras dans une forêt domaniale où l’on observe une très forte diminution de la population.
La dégradation des tapis de myrtilles et des sous-bois, plus généralement par le bétail et les grands cervidés est en effet un facteur limitant direct de la reproduction du Grand tétras, mais aussi indirect en favorisant la prédation sur les pontes et les jeunes qui sont nettement plus détectables par les prédateurs généralistes comme le renard, la martre ainsi que l’autour des palombes ou l’aigle royal.
Le Haut-Comminges est très touché par ce phénomène et l’on peut constater cette dégradation en plusieurs endroits. A l’inverse, on peut profiter du retour d’expérience de la création d’un enclos dans le luchonnais, où la mise en défens d’une clairière d’1 ha par un enclos en 2005 a permis de reconstituer en quelques années une évolution favorable de la végétation, avec le développement du framboisier, de la myrtille, de sorbiers, qui ont permis une amélioration de la capacité trophique du milieu pour le Grand tétras.
Dans le cadre du Fonds vert, un accord est en cours d’élaboration avec l’Office National des Forêts pour la création d’un enclos de 2 ha en lisière supérieure d’une sapinière pour la reconstitution d’une strate basse dense dans un secteur affecté par le surpâturage situé entre l’Ariège et la Haute-Garonne ; nous espérons pouvoir réaliser cette opération en 2024 par l’installation d’un système de clôture qu’il faudra visualiser pour éviter les collisions.
Nous espérons que cette action puisse bénéficier à un cortège bien plus large d’espèces (oiseaux nichant au sol tout comme les tétras, insectivores qui bénéficient de la riche entomofaune des sous-bois de myrtille ou les framboises) et à la biodiversité en général. Elle est susceptible d’enrayer sur ce périmètre l’effet des grands herbivores sur la végétation, à savoir la simplification de la flore en terme de nombres d’espèces (disparition ou forte raréfaction des plantes à fleurs annuelles et bisannuelles -astéracées ou papillonacées remplacées par des graminées rases comme la canche flexueuse) et une simplification des structures (au lieu d’avoir une hauteur des tapis de sous-bois de 30 à 60 cm, il est souvent réduit à moins de 10 cm, voire totalement absent dans le pire des cas).
Action 3
Le dernier volet d’action est une opération de sensibilisation dans le contexte de forte croissance des loisirs de nature, qui interviennent à des périodes sensibles du cycle biologique de l’espèce (hivernage et reproduction printanière du 1er juin au 15 juillet), où une quiétude maximale est de mise. Nature Comminges avait mené quelques actions de débalisage et d’entretien d’un sentier évitant une zone d’hivernage (après un accord de principe avec l’ONF) ; elle continue son suivi des mesures compensatoires définies en 2006-2007 suite au réaménagement de la piste « La Record » sur la station de Superbagnères ; ces actions ont permis de mener un programme de restauration d’habitats en marge de l’ensemble du domaine skiable qui a permis de conforter la population locale de Grand tétras ; ce programme se poursuit actuellement avec le débalisage d’un sentier et la lutte contre le hors-piste.
Dans le cadre du Fonds Vert, plusieurs actions sont prévues : contact avec les organisateurs de trails, animation sur les lieux touristiques à des périodes sensibles par des bénévoles et un salarié de FNE OP, création et distribution d’une plaquette d’information, de sets de table sensibilisant aux enjeux de protection du Grand tétras et enfin, création et installation de panneaux d’information au départ des sentiers balisés durant l’hiver 2023 et l’été 2024.
Nature Comminges reviendra sur le bilan de ses actions dans le cadre de ce programme collaboratif qui, on l’espère, permettra d’élargir les actions au-delà du cercle des associations naturalistes.
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