Pour que le « monde d’après » ne continue pas de perpétuer les aberrations écologiques et sanitaires du monde d’avant, en matière de déchets comme dans bien d’autres domaines , nous publions aujourd’hui ce communiqué, en partenariat avec Zero Waste Toulouse (ZWT) qui diffuse en parallèle aujourd’hui une lettre d’information plus complète sur le sujet, afin d’inviter tout un chacun, plus particulièrement les différents acteurs socio-professionnels et les décideurs/ses, à reconsidérer notre production démesurée de déchets. Nous rappelons que les ‘meilleurs’ déchets sont ceux que l’on ne produit tout simplement pas.
FACE AU VIRUS, DIRE OUI AUX GESTES BARRIÈRES ? DIRE NON AU RETOUR DU TOUT JETABLE !
A la vue des trottoirs, caniveaux et fossés jonchés de masques1, lingettes et gants usagés qui risquent aussi bien de transmettre le virus que d’aller polluer les sols, rivières et océans, le déconfinement2 progressif à l’œuvre depuis le 11 mai dernier nous rappelle que notre société succombe sous ses déchets, situation inacceptable qui appelle au plus vite des changements radicaux. La place prise dans notre société par le jetable et les déchets est considérable, alors qu’elle est trop souvent mise volontairement ‘sous le tapis’ : le virus ne doit pas occulter l’impérieuse nécessité de réduire nos emballages et nos déchets.
En première ligne face aux déchets, et ce dès le début de l’épidémie, les éboueurs3 chargés de collecter nos déchets ont été confrontés à une collecte dont ils ne connaissaient pas les risques sanitaires pour leur propre santé, tout en étant dépourvus de moyens de protection. Leur profession n’avait pas été déclarée prioritaire face à la pénurie, notamment sur les masques et les tests.
Si la collecte et la gestion des déchets sont essentielles à la salubrité publique, leur impact environnemental ne doit pas être pour autant relégué au second plan. Il s’agit là d’un enjeu majeur.
QUELLE RELATION ENTRE LA PRÉSENCE DE CE VIRUS, SA PERSISTANCE ET NOS DÉCHETS, NOTAMMENT PLASTIQUES ?
Nous savons que certaines épidémies, telle la dengue, transmise par des moustiques, ou d’autres plus anciennes, comme la peste véhiculée par les rats, prolifèrent à la faveur des dépôts d’ordures, casses de voitures et autres immondices. Qu’en est-il du Covid-19, doit-on s’alerter sur la présence du virus dans nos déchets ?
L’analyse des eaux de nos ‘tout à l’égout’ a révélé la présence du Coronavirus jusque dans les stations d’épurations de nos eaux usées, ce qui offre par ailleurs un bon moyen de surveiller indirectement l’évolution de la pandémie dans les différents secteurs géographiques connectés aux différentes stations d’épuration.
Nous savons que les matières et particules plastiques4 qui ont maintenant colonisé l’ensemble de la planète et du vivant ont des effets négatifs sur la santé.5 Elles contiennent notamment des perturbateurs endocriniens qui affectent nos défenses immunitaires, mais sont aussi à l’origine de micro particules toxiques pour les animaux qui les ingèrent.
Le plastique est pourtant plus que jamais présenté, moyennant un important lobbying des industriels du secteur, comme l’une des solutions barrières face au Covid-19. Nous sur-emballons tout, et nos commerçants se protègent derrière des films plastiques et des visières. L’industrie du plastique ne s’est jamais aussi bien portée, elle est l’une des seules à tourner à plein régime depuis des semaines. Nous n’avons jamais autant produit de films plastiques alors que, paradoxalement, à la surface de cette matière, une étude publiée dans le New England Journal of Medicine6 indique que le Coronavirus peut persister jusqu’à 3 jours…
Olivier ROSES, Président des Amis de la Terre du Gers et membre du bureau de FNE Midi-Pyrénées.
QUELLES QUANTITÉS ET GESTIONS ACTUELLES DES DÉCHETS ?
Nos questions appellent des réponses concernant la propagation de l’épidémie de Covid-19 via nos déchets, notamment ceux qui jonchent les rues, mais aussi sur la manière dont ils sont acheminés jusqu’aux centres de traitement, avec tous les risques d’envol et de dispersion que cela sous-entend, via les camions ou les plateformes de transfert soumises aux aléas climatiques :
. Quels ont été les impacts du confinement sur la production et la gestion des déchets ? Nous appelons les pouvoirs publics, notamment la Région et les collectivités territoriales, à faire connaître les volumes et types de déchets produits au cours des derniers mois et semaines.
. Qu’a-t-il été fait des déchets durant le confinement, alors que de nombreuses déchetteries et centres de tri étaient fermés ? Ont-ils été enfouis en plus grandes quantités au lieu d’être triés et recyclés, encombrant d’autant les Installations de Stockage des Déchets Non Dangereux (ISDND) et augmentant les risques de pollution diffuse des eaux de rejet ? Ont-ils été incinérés, réduisant à néant tous les objectifs d’une économie circulaire pour la valorisation et la réutilisation des matières ? De nombreux particuliers ont été amenés à gérer eux mêmes leurs propres déchets, et nous avons vu se développer des décharges sauvages, comme de trop nombreux feux à ciel ouvert pour des déchets verts ou autres.
. Quels ont été les effets exacts de ces brûlages sur la pollution de l’air mesurée par ATMO8 ces dernières semaines, malgré le confinement ?
Les déchets représentent la face cachée de toute activité. Débordants et envahissants, ils finissent toujours par réapparaître à travers leurs effets toxiques sur nous et notre environnement.
Soucieux du bon redémarrage de notre société, nous souhaitons disposer de données transparentes. Nous serons alors en mesure d’évaluer la gestion des déchets dans le monde d’après, lequel commence dès aujourd’hui.
A CHACUN.E. D’ENTRE NOUS D’AGIR
Nous appelons ainsi chacun.e d’entre nous, ainsi que les pouvoirs publics, à :
– ne pas différer les objectifs de suppression des plastiques à usages uniques
– rappeler la règle essentielle qui est de ne pas jeter ses déchets n’importe où, ni par terre, ni ailleurs, et à plus forte raison en période d’épidémie
– se saisir de ce sujet pour interroger son entourage, tout comme ses élus, sur la gestion et le devenir des déchets
– inviter à changer de modes de consommation et de pratiques en conséquence.
Nous contacter : contact(at)fne-midipyrenees.fr
N.B. : Nous rappelons l’existence de notre dispositif des Sentinellesdelanature.fr qui vous permet de signaler tout dépôt sauvage d’ordures ou toute autre atteinte à l’environnement. Vous pouvez aussi y signaler les initiatives favorables qui permettent notamment de limiter la production de déchets.
EN SAVOIR PLUS
1 « Dans les rues de Toulouse, ces masques jetés à terre… »
Plus que jamais recommandés, obligatoires dans les transports en commun, les masques se retrouvent parfois jetés à terre comme un simple papier. Toulouse n’échappe pas à ce mauvais réflexe observé dans toutes les villes.
Lire l’article de La Dépêche, 23/05/20
2 « Le déconfinement pourrait entraîner une surconsommation de plastique à usage unique »
À la lecture des recommandations du ministère du Travail sur le déconfinement, l’association No Plastic In My Sea a dénoncé jeudi 7 mai « un décalage entre la recommandation globale (centrée sur un socle de mesures barrières et de « distanciation ») et certaines fiches métier qui systématisent le recours au plastique et à l’usage unique, sans raisons explicites.
Lire l’article de Reporterre, 09/05/20
3 « Éboueurs et éboueuses, ils étaient « invisibles », mais en première ligne face au virus »
Les invisibles sont celles et ceux que la crise, comme une marée qui se retire, a révélé aux yeux de tous. Des femmes et des hommes qui se sont mis en danger pour faire tourner l’économie indispensable. Parmi ces travailleuses et travailleurs : les éboueur.e.s, qui n’ont pas désarmé pendant toute la durée du confinement.
Ecouter le Podcast de Reporterre, Les invisibles #3 du 23/05/20
4 « Plastiques et coronavirus : un ennemi n°1 de retour en raison de l’impératif sanitaire »
Il était devenu, depuis quelques mois, l’ennemi public numéro 1 de la lutte pour la protection de l’environnement avec une prise de conscience qui semblait avoir émergée.
Ecouter le Podcast de France Inter, L’ÉDITO CARRÉ du 26/05/20
5 « Le plastique est une menace pour la santé »
Les déchets plastiques polluent, on le sait. Mais c’est dès sa phase de production, au moment de l’extraction du pétrole, que le plastique est une source de pollution.
Lire l’article de Reporterre, 16/04/19
6 « Pollution : « On voit arriver une vague de déchets plastiques », s’inquiète l’association Zero Waste France »
Les associations environnementales s’alarment du retour massif du plastique à usage unique depuis la crise du coronavirus.
Lire l’article de Francetvinfo, 22/05/20
7 van Doremalen N. et al. Aerosol and Surface Stability of SARS-CoV-2 as Compared with SARS-CoV-1. New England Journal of Medicine 382;16 – April 16, 2020
8 « [COVID-19] Confinement et qualité de l’air en Occitanie : bilan à un mois »
Après quatre semaines de confinement, les profondes modifications de nos habitudes et de nos activités ont-elles un impact sur la qualité de l’air ? Atmo Occitanie dresse le bilan à un mois sur les conséquences de cette situation inédite sur la qualité de l’air en région.
Lire le communiqué d’ATMO Occitanie, 15/04/2020
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