Le tribunal administratif de Pau vient de demander au préfet des Hautes-Pyrénées de revoir son arrêté qui définit les « points d’eau » à prendre en compte lors de l’application des pesticides. Explications.
L’épandage des pesticides à proximité des « points d’eau » doit respecter une zone non traitée (ZNT) d’au moins 5 mètres
Pour faire face à la contamination généralisée de nos cours d’eau, un arrêté ministériel imposait depuis 2006 des zones de non traitement (ZNT) : des aires en bordure des points d’eau, sur lesquelles il est interdit d’épandre des pesticides. Cette mesure a fait ses preuves pour limiter la pollution, à condition que la largeur de cette bande soit suffisante, mais aussi que cette mesure concerne l’ensemble de nos points d’eau, même les plus petits. Jusqu’ici, cet arrêté concernait l’ensemble des éléments du réseau hydrographique de la carte de l’IGN, une carte incomplète mais qui permettait une protection minimale des points d’eau.
Seulement, voilà : depuis la modification de cet arrêté le 4 mai 2017, certaines préfectures ont exclu la carte de l’IGN pour se référer à une carte réduite (moins contraignante), établie par les services de l’Etat, en étroite collaboration avec –voire sous la forte pression de –la profession agricole :
- Ainsi en Ariège, en Aveyron, en Haute-Garonne et dans le Tarn : les points d’eau qui ne sont pas toujours en eau sont exclus
- En Hautes-Pyrénées le préfet exclu de la protection tous les canaux bétonnés ou busés, ce qui représente plusieurs centaines de kilomètres de canaux le long de l’Adour notamment, qui seront potentiellement en contact direct avec les pesticides
- Dans le Tarn-et-Garonne, la réglementation départementale est particulièrement critique, et ne retient que les cours d’eau dits « BCAE » (c’est-à-dire ceux conditionnés aux aides de la PAC) non busés et les plans d’eau de plus de 10 ha. Au final, 29% des cours d’eau identifiés dans la cartographie IGN sont exclus de cette réglementation « ZNT » et donc fortement sujets à la pollution aux pesticides
Le tribunal administratif enjoint au préfet de modifier son arrêté du 6 juillet 2017
Par un jugement du 21 janvier 2020, le tribunal administratif de Pau annule l’arrêté définissant les points d’eau dans le département des Hautes-Pyrénées considérant qu’il « méconnaît le principe de non-régression ». A la demande d’une partie de la profession agricole, la préfète avait alors enlevé de cette définition tous les canaux bétonnés particulièrement nombreux dans la vallée de l’Adour. Le jugement enjoint également au représentant de l’Etat de modifier l’arrêté du 6 juillet 2017 en retirant la phrase « Sont retirés de cette liste les canaux bétonnés et les canaux busés ».
Pour Cécile ARGENTIN, vice-présidente de FNE Midi-Pyrénées :
A l’heure où toute une réflexion est menée sur la qualité de l’eau à l’échelle des bassins, exclure à dessein des kilomètres de cours d’eau et des milliers de mètres cubes d’eau d’une réglementation ayant pour objet de préserver la ressource et les milieux des pollutions était une hérésie, ce jugement est une bonne nouvelle ! »
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