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14 mars, Journée internationale d’action pour les rivières

La journée d’action pour les rivières tire son origine d’une initiative brésilienne contre les grands barrages et les dégâts qu’ils occasionnent. Elle entend donc logiquement lutter contre les barrages et pour les rivières, pour l’eau et pour la vie.

Une histoire qui coule de source…

L’idée de la journée a été adoptée lors du premier sommet international des personnes affectées par les barrages (International Meeting of People Affected by Dams). Les représentants de 20 pays ont décidé que la Journée international d’action aurait lieu le 14 mars, date de la journée d’action contre les grands barrages au Brésil

Tous les ans, des milliers d’individus de par le monde élèvent la voix pour honorer les rivières du monde et les personnes qui luttent pour leur protection. La Journée international d’action pour les rivières est un jour où nous célébrons des victoires comme le démantèlement des barrages et la restauration de rivières. Un site à visiter : www.internationalrivers.org


Barrage de Caussade, les multiples impasses du projet

Et justement, en ce jeudi 14 mars 2019 le collectif FNE Adour Garonne était à Bordeaux pour l’audience sur le barrage de Caussade (Lot-et -Garonne), en soutien à FNE et la SEPANSO. Dans une tribune parue dans le quotidien Sud Ouest mercredi 13 février 2019, France Nature Environnement et la Sepanso Aquitaine revenaient sur les impasses auxquelles mène le projet du barrage de Caussade :

Dans le Lot-et-Garonne, depuis deux mois, un barrage de 920 000m3 dont la vocation principale est l’irrigation, se construit de façon totalement illégale sur 20 hectares à Pinel-Hauterive. Il barre le ruisseau de Caussade, affluent du Tolzac de Monclar.

Ce projet de retenue, porté par une Chambre d’agriculture dirigée par la Coordination rurale, est typique des pratiques du passé. Pour stocker l’eau, on creusait partout où la géographie du terrain semblait s’y prêter, sans regard sur les autres usages et enjeux environnementaux. Puisque le déficit de ressources en eau existe toujours sur ce bassin-versant malgré la présence de très nombreuses retenues, cette politique montre aujourd’hui ses limites. Face aux sécheresses de plus en plus longues et nombreuses, créer encore des stockages mène clairement à des impasses.

Impasse climatique tout d’abord. Ainsi qu’il est souligné par les avis techniques et scientifiques volontairement ignorés par les porteurs du projet, le surdimensionnement et les évolutions climatiques vont conduire à des années où il sera impossible de remplir le « Lac de Caussade », sauf à pomper dans le Tolzac, déjà en déficit. Et quand il sera rempli, ce sera au détriment d’autres retenues et des besoins des milieux naturels aquatiques. Développer de nouvelles surfaces irriguées sur un bassin-versant déficitaire n’est plus possible. C’est l’état réel des ressources en eau et leur diminution prévisible qui doivent guider une démarche d’adaptation de tous les acteurs du territoire.

C’est également une impasse juridique. Construit en parfaite illégalité, malgré quatre décisions de justice unanimes, ce barrage est en contradiction complète avec la directive cadre sur l’eau européenne, le Sdage[1] Adour-Garonne, le code de l’environnement pour la cinquantaine d’espèces protégées impactées… Ce dossier est déjà un long feuilleton judiciaire, où responsabilités et complicités devront être établies.

C’est une impasse financière. Via les dépenses engagées pour ces travaux illégaux, une part importante des moyens financiers de la Chambre d’agriculture a déjà été monopolisée au bénéfice de seulement 25 irrigants. Aucun financement public, qui aurait été de 64,3% du coût initial – estimé à 3 millions d’euros – ne peut venir aujourd’hui au secours d’un projet entrepris illégalement par des personnes dont ce n’était nullement le métier.

C’est une impasse en termes de sécurité publique. Les travaux ont été conduits sans contrôle technique, sans respect des règles de l’art. On ne peut tolérer la perspective d’une rupture de digue et d’une vague de 920 000m3 inondant la vallée. Quelles responsabilités – civile et pénale – pour la Chambre d’agriculture, quelle prise de risque inconsidérée !

C’est une impasse pour la transition écologique. Un ruisseau massacré, des destructions d’espèces protégées et de leurs habitats, un accaparement de la ressource en eau qui est un bien commun… Ce barrage est un véritable déni de la préservation des milieux aquatiques qui constitue la clé de voûte de nos possibilités d’adaptation future au changement climatique. De tels procédés favorisent une vision de court terme, à l’opposé de l’avenir souhaitable pour l’agriculture, de l’agroécologie et du respect des ressources naturelles.

C’est enfin une impasse pour notre démocratie. Peut-on accepter, dans un État de droit, que les agents publics soient empêchés d’assurer leurs missions ? Face à une ressource en eau plus limitée, chaque responsable possède deux choix. Ou bien encourager la loi du plus fort, ou bien innover collectivement et construire des projets de territoire pour permettre l’adaptation de tous à la nouvelle donne climatique.

Pour France Nature Environnement et la Sepanso Aquitaine, la conciliation des différents usages et besoins, par un dialogue argumenté et dans le respect de l’eau et de la nature, est la seule réponse possible permettant de construire des solutions pérennes.

Sortons enfin des impasses de Caussade.

Pour aller plus loin

Gestion quantitative de la ressource sur le bassin Adour Garonne (AEAG)

Insensé : les travaux du barrage de Caussade, interdits par nos actions en justice, ont repris en 2019 (janvier 2019)

A Caussade, le projet de barrage enfin remis en question par le gouvernement (octobre 2018)

Barrage de Caussade : un projet archaïque et surdimensionné (septembre 2018)


[1] Sdage: Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux